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2017

Une dernière année...
 

Pendant cette année, nous n’avons pu offrir que des moments de répits à Alice, des moments en dehors des rééductions, des moments libres où elle nous partageait sa vie de petite fille.  D’ailleurs, on sentait de plus en plus son désintérêt pour notre milieu.  Elle était ravie de nous voir, nous les accueillantes.  Elle nous interpellait, exigeait qu’on s’occupe d’elle. Mais elle entrait en relation de plus en plus rarement avec es autres enfants.  Elle sollicitait son frère pour qu’il lui apporte des jeux ou ramasse ce qu’elle voulait par terre, parfois pour qu’il reste près d’elle.  Elle regarde à peine les autres enfants.  Elle râle lorsqu’ils viennent s’asseoir sur sa chaise. Elle ne les remercie pas lorsqu’il l’aide dans une tâche.  Elle a plutôt un regard « hautain » envers eux.

Même si Alice éprouve beaucoup de difficulté point de vue moteur, elle a des besoins et des envies d’une enfant de son âge.  Petit à petit, nous nous rendons compte que nous n’arrivons plus à répondre à ses besoins.  Les interactions qu’elle a avec les enfants ne sont plus suffisant. Elle a besoin de jeux symboliques alors que les autres ont besoin d’exploration.  Par exemple alors qu’elle souhaite nous apporter une assiette pour qu’on goûte ce qu’elle a imaginativement préparé, un autre enfant voudra la fourchette pour mettre en bouche.

 

Ce exemple anodin nous montre encore une fois l’importance de développer notre projet pour les plus grands.  Si nous avions un accueil pour les enfants de plus de 3 ans pour des activités en dehors de l’école, Alice serait avec eux.  Son envie de socialisation pourrait être rencontré.

La fin de garde de Jacques : un plus pour tous.
 

Une fois de plus, cet accueil d’enfant en situation de handicap nous a aidé à améliorer l’accueil pour tous. 

Jusqu’à présent, à la fin de chaque garde, nous rencontrons les parents et échangeons sur le vécu et les apprentissages de leur enfant.  Ils peuvent nous faire part de leurs ressentis et de leurs suggestions. 

Mais grâce à la demande particulière de la maman de Jacques (cfr rapport 2016), nous avons affiné cette rencontre. 

Elle souhaite un document reprenant tout ce qu’on a mis en place pour son fils chez nous. 

Jacques doit partir en vacances avec un groupe de personne qui ne le connaît pas.  Sa maman souhaite leur donner le plus d’informations possibles pour les aider. 

Nous avons répertorié toutes nos observations dans un tableau ; nous avons laissé une colonne pour l’échange avec les parents et nous l’avons agrémenté avec quelques photos. 

Au final, en le lisant, on a le regard des accueillantes mais également de la maman et on peut se faire une représentation grâce aux photos.

Ce tableau nous l’utilisons avec toutes les familles en fin de garde.  A présent, il fait partie des souvenirs avec lesquels l’enfant part le dernier jour.

Des regards sur le handicap.
 

Le SAP prend contact avec nous car ils cherchent une solution pour permettre à Irène d’aller certains jours à l’école.  Connaissant notre ouverture, ils ont proposé aux parents de nous rencontrer.  Ils ne nous parlent de Irène que de manière succincte car ils savent que ce qui nous intéresse c’est de connaître ses besoins et non son handicap.  Ils nous expliquent seulement qu’elle a déjà subi de nombreuses opérations et qu’elle a besoin d’attention.  Directement nous pensons organisation : qu’est-ce qu’on va mettre en place pour son bien-être ? De quoi a-t-elle besoin ?  Quelle flexibilité offrir aux parents ?  Un nouvel enfant en situation de handicap donc un nouveau défi. 

Nous la rencontrons un soir avec ses parents et sa grande sœur.  Elle reste dans les bras de sa maman.  Elle paraît timide.  Il faudra prévoir du temps pour l’aider à se sentir à l’aise. Sa famille étant d’origine étrangère, il faut qu’on prenne le temps de s’assurer qu’on se comprend bien.  La langue mais également les coutumes peuvent être un frein à cette compréhension.  Une famille d’origine étrangère c’est un nouveau défi.

Nous passons du temps avec Irène et sa maman.  Elle adore être avec les autres enfants, elle essaie de les imiter.  Même si elle ne parle pas, même si son physique est différent, même si son rythme d’apprentissage diffère, Irène s’habitue très vite et les autres sont à l’aise avec elle.  Quelques attentions particulières à lui porter mais aucun changement important dans notre organisation.  Au final nous devons juste nous adapter à ses compétences qui ne sont pas celles d’un enfant de son âge mais les mêmes que celles d’enfants un peu plus jeunes.

Sa maman nous soutient dans son accueil, elle nous laisse le temps.  Malgré que son français ne soit pas « impeccable », elle nous donne toutes les informations que nous avons besoin de vive voix ou par mail.  Nous devons juste adapter notre temporalité. Pour la maman, il est essentiel que Irène fréquente le plus possible l’école alors que nous aimerions l’avoir plus avec nous.

Et puis il y a l’école, encore un autre regard.  C’est la première fois pour cette institutrice qu’elle accueille un enfant avec un handicap.  Étant donné que sa fille est également chez nous, nous pouvons échanger avec elle. Au fur et à mesure, nous la rassurons et lui montrons non le handicap d’Irène mais plutôt toutes ces compétences.  Nous lui montrons également non pas la difficulté d’un tel accueil mais la richesse. 

Au final ce dont nous sommes certaines, c’est que nous ne devons pas uniquement accueillir l’enfant en situation de handicap mais également être attentif à sa famille et peut-être même à son école pour que le regard que nous portons sur cet enfant soit le plus constructif possible.

Un carnet qui aide…
 

Ces carnets nous les regardons avec les enfants lorsqu’un enfant va partir à l’école, lorsqu’un frère ou une sœur est à l’école, lorsqu’un enfant est déjà parti ou combine crèche et école.  Toutes les occasions sont bonnes pour en discuter, se faire une idée. 

Bien que l’école d’Alice soit un particulière puisqu’on y prodigue des soins, elle peut trouver des similitudes avec celles des autres enfants.

Et puis il y a les enfants comme Zélina.  Elle n’est pas très rassurée.  Elle ne sait pas si elle a envie ou non d’aller à l’école.  Alors on en parle !  Les plus grands expliquent ce qu’ils y font.  On leur dit ce qu’on y a vu et qui ressemble à chez nous.  Certains le reprennent avec à la maison pour en discuter avec papa et maman. 

Tous ces petits moments aident à se préparer.  Tout doucement ils mettent des images et des mots sur ce monde inconnu qui les attend.

La soupe de Florentine
 

Cela fait plusieurs fois qu’on explique à la maman de Florentine que cette dernière ne veut pas boire sa soupe.  Lorsqu’on insiste, elle râle et ne veut plus rien manger. Pour toute réponse sa maman nous explique qu’à la maison, Florentine n’est pas obligée de manger de la soupe.  D’ailleurs elle n’est obligée de rien.  Elle mange suivant ses envies.  Ses parents lui proposent et essaient de lui donner envie mais sans la contraindre.

Oui mais alors comment faire chez nous ?  Comment respecter le choix de ses parents alors que pour d’autres il est important que leur enfant mange la soupe ?  Comment expliquer à un enfant que lui est obligé et pas son copain ?

Depuis le début nous essayons de tout faire pour respecter au maximum ce que le parent met en place avec son enfant.  Mais là nous sommes coincées !

En équipe nous prenons le temps de discuter.  Nous mettons en parallèle nos représentations, celles des parents, les besoins des enfants et ce qui se fait ailleurs.  Lors de notre voyage à Lyon (cfr rapport 2016), une responsable éducatrice nous avait interpellé par rapport à ces moments de repas.  Elle nous avait sensibilisé aux difficultés que pouvait avoir un enfant à manger avec des couverts.  Ce n’est pas quelques choses de naturels. 

Au final nous décidons de laisser plus d’autonomie aux enfants.  Dès à présent nous leur servirons leur assiette en même temps que la soupe.  Nous leur donnerons également leur gobelet d’eau.  Ils pourront choisir l’ordre dans lequel ils voudront manger ou boire.  Nous les laisserons utiliser également leurs doigts tant qu’ils ne jouent pas.  Au final les seules règles qu’il reste sont :

·       Il faut goûter de tout si on veut se resservir

·       On peut s’aider de ses doigts si on en a besoin sans en mettre partout.

Au fur et à mesure des jours, Florentine a goûté sa soupe.  Tous les enfants ont mieux mangé.  Et nous avons eu une ambiance plus détendue lors des repas.

Le voyage à Lille:  « l’analyse des pratiques »
 

Ce sujet nous touche directement.  Depuis l’ouverture, nous nous demandons quand et comment organiser nos réunions.  Nous avons essayé de prévoir des réunions pendant les heures d’ouverture de la maison d’enfants.  Mais c’est difficile car il y a toujours des enfants présents.  Nous ne sommes pas toutes entièrement concentrées.  Nous devons continuer de nous occuper des enfants.  Nous avons essayé le soir en proposant un petit repas pour rendre ce moment plus agréable.  Mais comme on fixe au fur et à mesure la date, il se passe souvent plusieurs mois avant la suivante.

C’est avec toutes ces questions que nous embarquons dans le bus.  Nous retrouvons Victoire, l’organisatrice de ce projet (cfr rapport 2016), les responsables des différentes structures d’accueil, certaines personnes du service « Accueil assistance », le responsable pédagogique de l’ONE Libramont et une gestionnaire du projet Tisserand. 

Sur le modèle de l’an dernier, ce voyage se partage entre :

•        des temps de rencontre commun où des intervenants nous expliquent comment ils ont mis en place le projet et pour quelles raisons

•        des temps de rencontre dans des structures en petit groupe.

Etant donné que le trajet nous prend moins de temps, nous pouvons profitez de plus de temps sur place.  Chaque petit groupe aura l’occasion de se rendre dans 2 structures différentes.

Pendant ces 2 jours, nous avons pu trouver des solutions.  Même s’il nous est impossible de transposer tel quel le projet de Lille chez nous, nous pouvons nous en inspirer.

Premier élément important, il faut institutionnaliser nos temps de réunions.  Chez eux ils font partie de leur temps de travail.  Il est tout à fait normal lorsqu’on travaille dans un accueil pour les enfants qu’on ait une à deux réunions par mois en soirée.  C’est inscrit dans leur règlement de travail.  Donc nous devons lui donner un cadre, l’inscrire dans quelques choses d’officiel.  Ceci est tout à fait possible chez nous.

Deuxièmement, ces réunions « d’analyse des pratiques » sont spécifiques.  Il ne s’agit pas d’une réunion d’équipe classique mais plutôt d’un moment qu’on prend à plusieurs pour se questionner sur une situation spécifique.  Il y a une personne extérieure qui garantit le temps et l’écoute de chacun dans un non-jugement.  Cette idée est plus difficile à mettre en place car cet intervenant extérieur est payant.  A Lille, la ville intervient dans la prise en charge financière.  Chez nous alors qu’on essaie déjà de tenir debout, il est impensable de prévoir un budget pour cela.

Troisièmement, l’inclusion est vécue comme quelque chose de naturel.  Pour eux il ne s’agit pas seulement d’inclure des enfants en situation de handicap mais aussi des enfants et familles précarisées.  Tout leur projet d’accueil va dans ce sens.  Même si certains lieux sont reconnus comme accueillant plus de handicap ou plus de précarité, l’importance de l’accueil est donnée à tous. Nous nous retrouvons dans cette idée. 

Depuis l’ouverture nous disons vouloir accueillir tous les enfants de la même façon qu’ils soient ou non en situation de handicap.  C’est peut-être mal exprimer et certains pourraient s’en sentir choqué.  Et pourtant comme à Lille nous voulons simplement ne pas mettre notre priorité sur leurs différences.

Nous rentrons, de ce voyage, fatiguées mais également enrichies.  Nous avons trouvé des solutions pour rendre concrète l’analyse de notre travail même s’il nous est impossible pour l’instant d’aller aussi loin qu’eux.

Chaque enfant son référent.
 

Cela fait déjà plusieurs fois que nous sommes interpellées par cette réflexion : « Il est important que chaque enfant ait un adulte référent. »  Quels sont les fondements de cette importance ?

Plusieurs fois déjà, le conseiller pédagogique nous pose la question : « avez-vous un adulte de référence pour chaque enfant ? ».

Nous échangeons à ce sujet en équipe, nous questionnons notre collègue qui vient de terminer des études de « directrice de maison d’enfants ».  Mais nous ne trouvons pas de réponse. Pour quelles raisons est-ce si important ? 

Nous sommes d’accord :

•        qu’il est important que chaque enfant soit regardé.  Il faut être vigilent à ne pas en laisser un de côté, sans attention,

•        que le nombre de personne qui s’occupent de l’enfant si petit doit être limité.

•        que dans une grande structure, le référent donne des garantis par rapport au bien-être de l’enfant,

•        que l’enfant peut se sentir rassuré de savoir qu’une personne lui porte plus d’attention.

Mais nous sommes une petite équipe (5 maximum), nous n’accueillons que 15 enfants par jour au maximum.  Et que fait-on des affinités, des besoins de chacun ?

C’est le moment ! On aborde le sujet et pour la Xème fois, le conseiller pédagogique nous interpelle : « et vous, vous avez des rôles de référence ? ».  Alors nous en profitons pour faire part de notre point de vue.  Comment sait-on à l’avance que cet adulte est la personne la plus adéquate pour l’enfant et sa famille ?  Comment fait-on si après quelques semaines l’enfant préfère qu’une autre puéricultrice s’occupe de lui ?  Si la puéricultrice part, qui porte l’attention sur l’enfant ? Et la puéricultrice qui travaille à mi-temps, l’enfant dont elle est référente est lésé ? L’enfant ne cherche-t-il pas chez l’adulte ce dont il a besoin ?… Toutes ces questions nous empêchent de trancher et de comprendre l’importance de ce rôle.

En sortant de cette réunion, nous n’avons pas de réponses.  Par contre la réflexion est amorcée.  Nous continuons de tout mettre en place pour que chaque enfant soit porté par l’attention d’au moins une personne et nous essayons de favoriser les liens spontanés.

Les chèques services luxembourgeois.
 

Depuis quelques mois, les frontaliers peuvent bénéficier d’une réduction dans leurs frais de gardes lorsqu’ils inscrivent leur enfant dans un milieu d’accueil reconnu par le ministère des familles du Grand-Duché de Luxembourg.  Bien que proposé dans un premier temps, aucun milieu d’accueil belge peut prétendre à cette reconnaissance puisque nous ne pouvons pas favoriser l’enseignement luxembourgeois en accueillant des enfants chez nous.

Cette responsable d’un milieu d’accueil du sud de la province de Luxembourg rencontre des difficultés pour remplir son milieu d’accueil.  Elle est tout près de la frontière et la majorité des familles qui s’inscrivent chez elle ont pour un des deux parents au moins un emploi luxembourgeois.

Cette nouvelle réforme lui aurait fait diminuer son taux d’occupation.

Mais alors si elle est touchée, peut-être que nous aussi.  Pourtant il nous parait difficilement envisageable qu’un parent choisisse de faire endurer des heures de bouchons à son enfant juste pour payer moins.

Après quelques réflexions, nous constatons que nous avons moins de visites voir plus du tout depuis quelques semaines.  Serait-ce dû à ces chèques services ?  

Pour l’instant, nous continuons d’être rempli.  Mais comme toujours, nous devons voir plus loin.  Il nous faut des inscriptions 9 mois à l’avance pour assurer un taux de présence optimal. 

Nous terminons le reste de l’année avec seulement 2 visites en décembre.  Qu’une seule famille nous confiera son enfant.  Cette baisse de demande serait-elle dû aux « chèques services ?

Les responsables des autres milieux d’accueil ne se plaignent pas de cette baisse d’inscription.  Au contraire la structure d’Habay dit pouvoir remplir cette nouvelle structure.  Elle augmente sa capacité d’accueil suite au Plan Cigogne II. Alors est-ce que les chèques services luxembourgeois ont-ils ou non une influence sur notre taux de remplissage ?

Une stagiaire surprenante
 

En juin, la maman de Sylvie prend contact avec nous.  Sa fille de 19 ans en situation de handicap suit sa scolarité dans une école spéciale.  Durant cette année scolaire, elle a pu faire un stage dans une crèche.  Elle aime le contact avec les enfants.  Sa maman souhaiterait qu’elle vienne quelques jours pendant les vacances pour s’assurer qu’elle aime vraiment.

Les deux semaines passées avec nous ont été surprenantes.  Sylvie qui parle très peu, qui ne laisse pas transparaître ses émotions a tout de suite été accepté par la majorité des enfants.  Elle est attentive à tout ce qui se passe autour d’elle et réagit adéquatement.  Au final, elle nous a vraiment aidé dans l’accueil de tous les jours.

Puisqu’elle doit trouver un stage pour sa dernière année scolaire, nous lui proposons de venir chez nous tous les jeudis et vendredis de l’année scolaire. 

Depuis l’ouverture, nous aimerions une personne comme elle dans notre équipe.  C’est peut-être l’occasion.

Peu de temps après le début de son stage, nous rencontrons son professeur.  Elle est prête à nous aider à la former suivant ces capacités.  En juin 2018, elle a fini l’école.  Elle ne pourra pas travailler en tant que puéricultrice. Elle n’aura pas le diplôme requis.

Nous décidons de réfléchir à des solutions pour lui offrir une place chez nous.  Son professeur ainsi que sa maman vont se renseigner de leur côté, voire avec l’AViQ ce qui est possible.

En attendant, Sylvie nous accompagne toutes les semaines.  Elle joue avec les enfants, assure leur sécurité et leur bien-être et nous aide dans les tâches quotidiennes.  Et nous, nous lui apprenons certains gestes du métier et la soutenons dans tâches plus délicates à son rythme.

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